under the sea (( girls ))

le réveil lui paraît difficile. il entend au loin la trompette du roi. le jour se lève à oceanville. chacun bat de la nageoire, se lève de son coquillage. il est temps de commencer la journée, de se rendre à l'académie pour étudier ou juste d'exister. eojin se lève à contre-cœur. il aurait préféré que tout ça ne soit qu'un rêve mais non. c'est un cauchemar et la tristesse l'assaille. vilaines pensées, la peur qui l'envahit. il a disparu, lui précieux être à ses yeux. eojin ne sait pas quoi faire, il reste là à contempler sa propre nageoire pour plusieurs minutes. et puis la conclusion, il la trouve. il doit le chercher, le trouver. quitte à placarder des affiches sur toutes les algues de la ville, peu importe. il se prépare et quitte son modeste corail. il erre dans la ville, se perd entre les sirènes et les bâtiments. et puis alors que l'espoir le quitte, on vient le bousculer. peut-être est-ce l'amertume qui parle mais eojin est agacé. « vous n'auriez pas pu faire attention ? vous m'avez donné un coup de nageoire. » soupir qu'il laisse échapper. et puis au lieu de pester, il pose la question fatale. affiche à la main, il leur montre. « j'ai perdu mon chien crevette. est-ce que vous l'auriez vu ? » perdu, perdu. disparu mais eojin doit le retrouver.

tapi dans les rochers, bora bat de la nageoire. son souffle se faufile en caressant la dune pendant que ses écailles verte émeraude glissent le long des sables d'or. elle nage terriblement vite et traverse océanville telle une tempête injurieuse. déjà, à l’horizon se profilent les maisons de coraux et les arbres d'algues dont le feuillage s'entremêle parfois parmi ses longs cheveux épars. si elle se dépêche ainsi, ce n'est pas pour éviter les embouteillages ou le trafic énervant d'hippocampes, mais pour être à l'heure à son cours de dressage de requins — oui, car bora souhaite devenir dresseuse et monter son propre cirque aquatique. il lui est donc impossible de prendre son temps ! hélas, sur son chemin, elle s'accroche à cette autre sirène au regard inquisiteur, comme si le bousculer était un crime ! « un chien crevette ? non, jamais vu ! il s’est peut-être fait manger par une orque. en ce moment il y a beaucoup d’orques dans l’océan ! mais si vous voulez, je connais quelqu’un qui pourrait nous aider ! la sorcière des fonds marins ! elle s’appelle @No Yon et elle vit tout près. »

Yon sirote son verre d’air frais d’une paille rose à moitié mordue, yeux fixés sur le rocher sur lequel sont inscrites les dernières affaires criminelles d’oceanville. Elle fait le long du mur, cherche un dossier qu’elle pourrait prendre pour occuper son esprit qui ne cesse de graviter vers le maelstrom Hea, la princesse d’oceanville. Rien. Toutes les affaires sont classées, ou prises, ou abandonnées par d’autres sorcières sirènes. Hm. Elle devrait être contente : ça veut dire que la ville est en sécurité. Or ça vaut aussi dire qu’elle a la journée off et, ayant zéro hobby à part boire de l’eau de mer alcoolisé, elle se connaît, elle va finir dans son bateau coulé (sa maison lol) à regarder des séries sur Wetflix sans rien faire de productif.

Et c’est exactement ce qui s’est passé.

Elle est en train de regarder un re-run du film Disney la petite humaine quand on toque à sa porte. Elle n’est pas amusée et elle ne le cache pas. Yon accueillit les intrus son amie – Bora et un inconnu baroque – de sourcils froncés.
« Qu’est-ce que vous voulez, les crevettes ? »

toujours cette douleur en pleine poitrine, l'incertitude qui le traverse - le transperce. eojin qui voit pourtant un espoir dans cette rencontre inattendue. coup de nageoire sur lequel il s'énerve mais la question est posée. et la mal polie se révèle peut-être plus gentille qu'on aurait pu le penser. elle n'a pas vu son chien crevette, déception. sauf qu'elle rallume l'espoir en lui disant que quelqu'un pourrait aider. sorcière ? eojin n'a pas peur. il ferait n'importe quoi pour son chien crevette. il ne peut toutefois que prier pour qu'il n'ait pas été le repas d'orques. « j'espère que non. merci beaucoup, je ne savais pas qu'elle était si proche. » eojin et la sirène nagent à toute allure en direction de la maison de la sorcière. durant le trajet, il extorque son prénom à l'inconnue. et puis ils en viennent à toquer à la porte de la sorcière. jolie créature mais eojin n'a jamais été attiré par ce genre de nageoire. la situation est un peu baroque mais eojin répond. « voilà j'ai perdu mon chien crevette et bora m'a dit que vous pourriez m'aider à le retrouver. »

la tension est palpable. autour d'eux règnent l'angoisse et l'incertitude. pourtant, bora ne perd pas espoir. elle sait, qu'ensembles, ils peuvent encore retrouver le chien-crevette égaré. néanmoins, un étrange sentiment fait frétiller sa nageoire. mais elle se tait et prend le temps d'écouter la plainte du malheureux. parfois, elle acquiesce ses propos, hochant les épaules, ou en tournant la tête de gauche à droite, sans trop savoir quoi faire, ni quoi penser de toute cette histoire saugrenue. « tu penses pouvoir le retrouver ? j'espère qu'il n'est pas encore mort, ça serait dommage... se donner autant de mal pour un cadavre... enfin bref ! j'en perds mes écailles ! @No Yon, tu as encore ta boule de cristal ? peut-être qu'on pourrait s'en servir pour retrouver ce crustacé ! » intimement, elle espère que la jolie brune puisse les aider, et vite ! hélas le temps presse. bora doit encore se rendre à son cours de dressage.

Yon bat des paupières et scrute les deux arrivants un long moment. Parce qu’elle se rend compte qu’ils n’ont même pas peur d’elle – elle qui se tient à l’encadrement de sa porte d’une posture imposante et de yeux défiants – et ça heurte un peu beaucoup son égo. M’enfin. Leur visite justifiée, leurs intentions dévoilées, sa colère s’évapore en quelques bulles d’air alors que son excitation prend place. Elle s’écarte et ouvre un peu plus la porte pour les intimer à rentrer, esprit déjà occupé à tracer un plan d’attaque. « C’était quand la dernière fois que tu l’as vu ? Tu n’as pas une photo de lui ? » Si aucune idée à quoi il ressemble, ils auront beaucoup plus de mal à le retrouver. Sa boule de cristal (un ballon de foot signé par Zidane, pour être plus exacte) est déjà sur la planche de surf du salon – table improvisée sur laquelle traînent beaucoup trop de trucs d’ailleurs, mais la sorcière n’irait pas jusqu’à s’excuser du bordel. Elle se pose devant la balle et attend que les deux autres la rejoignent. « C’est quoi son nom déjà ? J’ai besoin que tu poses ta main sur la boule, et que tu penses très fort à ton chien crevette. Et si tu te mets à pleurer, je jure par la tête d’un dauphin pas coincé dans le plastique des américains que je te bute et je t’offre en sushi aux pauvres du village. »