pretty good at bad decisions )) rio

il fallait presque l’y forcer autrefois, des promesses pour qu’il écrase sa fierté en passant les portes d’un hôpital. Ses blessures jamais bien graves, mais de quelques-unes mal soignées, il en porte des traces qu’il ne compare qu’à des trophées pour son courage. Pourtant cette nuit, il n’a pas hésité pour ce qui ne ressemble qu’à des éraflures. Une chute dans un virage qu’il a pris trop vite et il n’est pas rare de le voir commettre de telles imprudences, mais elles se multiplient ces dernières semaines. L’adrénaline ne lui suffit plus et c’est le danger qui le ranime chaque nuit quand ses journées ne parviennent plus à le combler. Il doute hiro, ces derniers jours. Il a vu une amie chère entre la vie et la mort et depuis, tout déraille. Il regarde le ciel avec incertitude et se blesse plus souvent, comme s’il cherchait des réponses à des questions qu’il ne connaît même pas. c’est le bordel dans sa tête, mais il passe les portes des urgences avec une détermination étrange. Il rejette les voix qui veulent l’aider à la recherche d’une seule personne, mais les secondes filent et on lui conseille de s’installer, calmement malgré le ton désinvolte qu’il utilise. « vous pourriez me dire d’aller voir ailleurs, ah vous les médecins… » difficile de les provoquer ou de chercher la confrontation avec eux ; ils ne sont pas drôles et hiro l’a appris il y a longtemps. Ça ne l’empêche pas de rejeter l’infirmier qui approche et de l’envoyer s’occuper d’un vieillard fébrile, ruminant presque. Il y a son épaule qui le fait souffrir et du sang sur le côté de son visage. Oh l’abruti roulait sans casque, mais par chance il n’a fait que s’ouvrir l’arcade. Une autre imprudence qu’on compte parmi le reste et son regard s’égare vers les portes. Il n’aime pas les hôpitaux, les odeurs qui prennent le nez et l’atmosphère lourde qui s’en dégage. Il n’aime pas les hôpitaux, mais il apprécie cette jeune femme qui y passe des jours et des nuits. Une femme qu’il ne sait pas encore définir, ni inconnue ni amie, mais qui lui placarde un sourire au visage lorsqu’elle apparaît. « hey rio ! douceur ?? » l’infirmier à ses côtés retente alors de nettoyer sa blessure à l’arcade, mais hiro l’esquive avec une expression comique frisant celle de la trahison. le fourbe. « mais casse-toi, faut t’le dire en quelle langue ? » le ton sec, il tente de se lever et on le laisse faire, mais il se rassoit bien vite en sentant la pièce tanguer. Seulement, il refuse toujours l’aide qu’on lui offre et son regard s’arrête une fois de plus vers les portes.

cachée derrière sa main elle baille à s’en décrocher la mâchoire. la soirée semble interminable. à croire que les minutes passent au ralenti. la nuit est tranquille. c’est aussi satisfaisant qu’ennuyeux. des petits vieux qui s’inventent des douleurs pour un peu de compagnie ou des cas mineurs. une chance encore qu’elle ne soit pas de garde jusqu’au petit matin. car la nuit les heures semblent s’allonger. la jeune femme accepte volontiers lorsqu’on lui propose une pause. elle ne fume pas comme les autres mais c’est toujours mieux que d’attendre seule. l’une d’entre elles parle de sa lune de miel au japon et les têtes se tournent vers rio. elle sait pas quoi répondre. elle n’a jamais beaucoup voyagé, faute de moyen. pas avant son road trip improvisé avec mia l’été précédent. et rio garde un souvenir amer de ce périple. à la recherche d’oublie et de repentance. et elle n’a toujours pas fini de fuir rio. elle se terre dans un mutisme angoissant. elle ne peut toujours pas s’arrêter de penser, de bouger. sinon les souvenirs et le chagrin remonte sournoisement. avec toujours la même constatation affligeante, elle pense encore à lui. culpabilise toujours et encore d’être partie sans un mot. devant son silence ses collègues préfèrent éluder la question. et puis finalement elle dit qu’elle va aller faire un tour aux urgences. à quoi bon rester là à ne rien faire.
elle avance dans les couloirs les épaules basses. soupire. pourvu qu’il y ait de quoi l’occuper. pourvu qu’elle puisse concentrer son esprit sur autre chose. qu’elle oublie vite. il y a tant de malheurs plus graves que le sien en ces lieux. elle fait pâle figure avec son chagrin d’amour. elle n’est plus vraiment amoureuse. juste terriblement nostalgique. culpabilise avec la même ardeur qu’aux premiers jours. c’est la délivrance quand on appelle son. elle sourit un peu trop quand elle voit hiro. encore plus devant son manège avec l’infirmier qui tente de le soigner. elle sait qu’il est un cas désespéré. qu’il faudrait l’attacher pour lui prodiguer des soins. « laisses je vais m’en occuper. » elle pose une main sur l’épaule de son pauvre collègue qui n’a jamais eu à faire au cas ueda hiro. à croire que rio semble être la seule à pouvoir dompter l’animal lorsqu’il est question de sa santé. son sourire s’évanouie alors qu’elle examine la figure en sang du garçon. elle voudrait qu’il fasse plus attention à lui. la vue d’une connaissance mal en point lui est toujours aussi désagréable. qu’elle le veuille ou non son cœur se serre. « qu’est-ce c’était cette fois ? » elle soupire avant de se redresser. il va lui falloir plus de matériel que prévu. « je vais chercher de quoi arranger ton arcade. ne bouge pas. » malgré toute sa gentillesse rio sait faire preuve d’une certaine autorité quand il le faut. au travail uniquement. quand il faut prendre soin de ceux qui ne le font pas eux même.

il aurait pu s'arrêter dans une pharmacie et s'en occuper lui-même avant de rentrer. il le faisait bien jusqu'à maintenant, parce qu'il ne se laissait pas aller aussi loin. il était plus prudent malgré sa témérité, mais il a perdu le reste du bon sens qu'il lui restait en l'espace de quelques mois. il hausserait les épaules si on lui demandait comment ; comment il aurait pu oublier son casque, alors que l'acte était conscient. il n'avait juste pas prévu de se blesser et ça fragilise sa fierté, mais il n'en perd pas les attraits. il repousse l'infirmier gentiment au début, mais face à l'insistance du pauvre homme, l'impolitesse se montre. surtout lorsque son attention a été déviée sur une bouille plus familière qui, inconsciemment, est la raison de sa présence ici. il serait rentré chez lui si elle ne bossait pas dans cet hôpital, mais il n'était pas sûr de l'y trouver non plus ce soir. elle est parmi les seules avec qui il est plus conciliant, mais ça ne le rend pas moins borné. « j'ai glissé. » dit-il en souriant bêtement, comme s'il n'avait fait que trébucher. en réalité, il se trouve chanceux d'avoir été seul sur cette route, sans quoi il aurait probablement eu des soucis plus graves en impliquant une tiers personne. là, il a pu repartir comme si de rien était. il ne s'en veut pas de déranger rio, mais il est toujours aussi tenté de quitter les lieux. les urgences sont le pire endroit, mais il accepte. « yes ma'am, j'te laisse deux minutes. » clin d’œil. pendant l'absence de rio, il retire sa veste en grimaçant et soupire d'avance pour les courbatures qu'il aura gagné le lendemain, mais le jeu en valait la chandelle. pour une raison ou une autre, il ne regrette pas sa sortie nocturne ni la connerie qui l'a mené ici et si on lui en donnait l'occasion, il referait les mêmes gestes. l'adrénaline est toujours dans ses veines, mais à mesure des secondes la douleur s'intensifie, comme si son esprit prenait conscience du choc subi avec deux temps de retard. il passe outre cela dit, comme souvent. et quand rio revient, il ne se résigne pas tout de suite à la laisser faire et bouge un peu trop la tête et les mains. « nuit calme ? heureusement que j'suis là pour te faire bosser. » énième sourire fier, mais la douleur le fait grimacer et il agite les doigts vers son propre visage. ça commence à le gêner, mais il le prend toujours avec humour comme pour alléger l'atmosphère. rio a l'air d'avoir besoin de légèreté, pas de s'inquiéter. et puis, pourquoi s'inquiéterait-elle pour un type comme lui ? cas désespéré. « ça va toi ? »

elle fronce les sourcils. pas du tout amusée par le comportement irresponsable d’hiro mais se passes de toutes remarques. à quoi bon ? il n’en fait qu’à sa tête, ça rio l’a compris depuis leur première rencontre. et il lui semble qu’elle accompli déjà un exploit de taille en arrivant à le soigner lorsqu’il débarque à l’hôpital comme ce soir. il n’est pas encore né celui qui arrivera à échapper à la bienveillance de la jeune femme. pas même cette tête de mule d’hiro. aussi borné soit il. elle ignore ouvertement son clin d’œil. à croire qu’il est le seul à réussir à la pousser à faire preuve d’autorité. elle y arrivait aussi avec ichiro mais elle finissait toujours par fondre en larmes. là ses yeux restent tout à fait sec malgré un pincement au cœur dont elle ne pourra surement jamais se défaire. un léger soupire lui échappe tandis qu’elle tourne les talons pour aller chercher un chariot où elle trouverait le nécessaire pour soigner le jeune homme. d’abord des compresses pour nettoyer son front ensanglanté. elle se penche pour tenter d’approcher le visage du garçon mais celui-ci se débat. ce qui ne tarde pas à faire grimacer rio qui fait claquer sa langue contre son palet. « tiens toi tranquille et laisses moi travailler. » une vraie anguille. ça lui rappelle la pêche sur son île natale et peut être bien qu’elle préférait se débattre contre les poissons qu’hiro qui gigote dans tous les sens. et la voilà qui fronce de nouveau les sourcils. non vraiment, il ne l’amuse pas du tout. pourtant il vise juste. la nuit était bien trop calme pour son esprit agité. et silencieusement elle ne peut que le remercier pour tenir ses pensées occupées. mais l’idée de se réjouir de la blessure d’un ami lui est insupportable. il ne devrait pas être là, la figure en sang. et elle ne devrait pas souhaiter le malheur des autres juste pour oublier le sien. une chance encore que le comportement du jeune homme l’énerve assez pour que rio n’ait pas le temps de s’auto flageller ni même de se trouver égoïste. « ne sois pas idiot. » répond-elle dans un soupir. elle pousse sa main de devant son visage et vient prendre appui sur l’une de ses épaules pour se faciliter la tâche. « hum. » réponse du bout des lèvres alors qu’elle peut enfin commencer à faire son travail. « et bah tu t’es pas raté. » le mieux serait de faire un point de suture mais il est peut être déjà trop tard et elle doute fort qu’il accepte. « mieux que toi en tout cas. » elle sourit en se redressant. physiquement c’est sûr.