only fools fall for you (jiwon&si yeon)

l’amphithéâtre se vidait progressivement, le gamin suivant toute cette cohorte quitter les lieux, le jour commençant à décliner pour laisser le ciel se teinter d’une couleur bleutée, petit à petit. malheureusement, jiwon aurait espéré pouvoir apprécier cette douce soirée à des choses plus bénéfiques que son inlassable routine, s’empressant d’arriver à yeouido, traversant multiples quartiers de la capitale, bouquins posés sur ses genoux dans ces métros bondés de peuple, continuant ses révisions, le temps d’un trajet bien assez rapide. tablier rapidement enfilé autour de la taille, diverses odeurs de cafés et une boutique déjà fort bien remplie suivie d’un patron ne cessant de râler auprès du gaillard. « désolé monsieur, les transports en communs avaient du retard ce soir.. » congédié au travail sans la moindre empathie, sourire forcé naissant sur ses pulpeuses, courtois et aimable face à la clientèle, la soirée débutait seulement pour le gamin et l’envie de se terrer dans son lit était déjà fortement présente. « ça commence bien. » murmure presqu’inaudible, quotidien lassant et journées se ressemblant beaucoup trop, routine incessante qu’il voulait changer, sans en avoir néanmoins les moyens. enfin, l’arrivée furtive de cet apollon rencontré auparavant chamboulait d’ores et déjà sa soirée, lui qui pensait à une énième nuitée sans le moindre rebondissement, clients servis au compte-goutte sans une once de reconnaissance, il avait tort. ses iris suivaient avec attention le moindre de ses gestes, ses joues se teintant lentement d’une couleur rosie, sourire niais se dessinant sur ses croissants de chairs, le cadet n’avait plus que le garçon dans son esprit, laissant collègues s’occuper des demandes des clients, s’empressant d’aller à la table du jeune homme, organe vital tambourinant dans sa cage thoracique. « bonsoir, si yeon.. je sais pas si vous vous rappelez de moi, shin jiwon, je vous avais demandé deux trois conseils pour quelques travaux pour ma fac y’a pas si longtemps.. timidité qu’il tentait de vaincre malgré tout, gorge raclée une énième fois, stylo en main prêt à noter sur cet infime pièce de papier la commande de l’aîné, qu’il ne pouvait pas s’empêcher de trouver plus que ravissant, par ailleurs. enfin bref, je vais pas vous embêter bien longtemps, qu’est-ce que vous désirez ? »

(tenue). Visage perdu dans une foule à la tête baissée et aux regards maussades, Si Yeon quittait le gratte-ciel pour reposer le pied sur la terre ferme où l'odeur des ruelles ensevelie de visages politiques reposait. Il expirait sauvagement toute son humeur négative de la journée avant de reprendre sa marche. Ce que les bureaucrates pouvaient être énervant parfois, même lorsqu'ils étaient eux-même en tord. Son prochain procès arrivant à grands pas, il se décida à la hâte de rentrer dans le premier café du coin pour s'y poser quelques heures ; une envie soudaine de changer de décor dans l'unique but de se concentrer sur son travail. À l'appartement, il se connaissait : Hea dans les parages et ses préoccupations de l'instant changeait du tout au tout. Sa princesse avait inconsciemment des pouvoirs magiques, magie blanche aux sorts noirs, puissants, incontrôlable. Alors c'était comme une évidence, même s'il avait envie de retrouver ses lippes souriantes, il s'était arrêté dans un Starbucks du coin – premier essaie, dernier peut-être ? Cherchant du regard une table vide de monde, il s'installa, mallette de travail pour seule compagnie. « Hum… Vaguement ? » répondit-il au serveur qu'il semblait connaître mais dont seul le visage lui était familier. Si Yeon oubliait tout le monde, volontairement ou non. Il s'excusa indirectement après quoi il perdit son regard vers la carte des boissons. « Un Américano sans sucre s'il vous plaît. » commanda-t-il presque froidement sans dédaigner cligner des yeux vers le garçon. Il commença sans plus tarder à ouvrir ses deux pochettes où il déposa sur la table un tas de document. Crayon de papier dans la bouche, il lisait dans les moindres détails chacune des lignes imprimées.

les séoulites devenaient de plus en plus nombreux dans les rues de la capitale. heure de pointe, les clients affluaient dans la boutique, le jeune homme désespérant de compter les moindres secondes restante avant qu’il finisse par retrouver son chez soi. home sweet home disait-on, jiwon se languissait de pouvoir s’affaler sur son lit, à feuilleter quelques pages de son bouquin avant de tomber dans les bras de morphée, nouvelle routine débutant au réveil. il pensait que cette soirée – tout comme les précédentes – allait être effroyablement interminable mais c'était néanmoins sans compter l’image même de l’élégance et du charisme débouler dans le café, regard ténébreux qui pourtant faisait fondre le gamin, cœur battant la chamade plus il s’approchait de l’aîné, stylo tenu fermement entre ses doigts fins. froideur déstabilisante mais pas moins charmante, la commande préparée avec empressement. à peine avait-il fini, se dirigeant vers lui que l’apollon s’était déjà attelé, papiers disposés sur la table, expression sur son visage reflétant sa sérosité. jiwon avait était admiratif, constellations dans ses iris, la voix presque tremblante lorsqu’il avait apporté la boisson du jeune homme, trop curieux pour ne pas s’intéresser sur son travail. « oh, vous travaillez sur quelque chose ? ça à l’air intéressant. je fais des études en droit depuis que j’ai arrêté la danse, ça traite sur quoi votre dossier ? entrain probablement trop invasif, raclement de gorge gêné, le simplet s’apprêtait à tourner les talons, embarrassé. pardon, je suis trop indiscret, je vous laisse travailler, savourez bien votre américano. » soupir inaudible traversant ses croissants de chairs, il avait probablement froissé le gaillard, trop concentré dans ses affaires. quelle belle soirée.

(tenue). Nouvel endroit, nouvelles têtes, nouveautés appréciables, désagréables. Chacun des papiers relatait de faits peu important aux yeux de Si Yeon ; même s'il appréciait son métier, certains cas devenaient plus lassant que d'autres et cette fois-ci n'échappait pas à la règle. Il avait étudié pour devenir procureur en acceptant les bons comme les mauvais côtés du métier. Fort heureusement, le meilleur triomphait plus que jamais à ses yeux. Il aimait la gloire lorsqu'il emportait des procès qui lui tenaient à cœur, où il jugeait bon d'innocenter certains accusés, d'autres fois lorsqu’il fallait prouver la culpabilité flagrante des autres. Cette semaine, un cas ordinaire se pointait devant lui et il avait jugé correcte d'étudier une nouvelle fois le dossier de son client. Barbant dans un sens, amusant de l'autre.

Toujours plongé dans son aventure littéraire, il ne remarqua pas sa commande arrivée sur la table. C'est seulement lorsque le serveur l'interpella qu'il releva la tête sans prononcer un mot. Il scruta un peu plus sérieusement le physique de son interlocuteur qui ne le laissait pas indifférent. Son expression n'affichait rien, toujours son regard sérieux dans les yeux. « Je me souviens. » lâcha-t-il alors que le garçon en face de lui commençait à se retourner. Si Yeon fit un signe de tête discret vers le siège face à lui. « Je me suis occupé de toi il y a quelques mois, pas vrai ? Tu aurais dû commencer par-là plutôt que de m'embarquer dans tes histoires de conseils à la fac ou je ne sais quoi. J'en vois tous les jours des étudiants. » continua-t-il en prenant son gobelet de caféine dans la main. Le procès du danseur et de l'accident malchanceux, les mois d'hôpital et les rêves en morceaux. S'il pouvait oublier un tel scandale ? Sûrement pas. « Tu t'en remets ? » demanda-t-il peut-être avec une once d'indiscrétion avant de porter sa boisson à ses lippes. Il grimaça légèrement à la suite de son action puis replongea son regard dans celui qui se trouvait face à lui. Comment est-ce qu'il s'appelait déjà ?

regards discrètement lancés, rougissement très légèrement percevable, le candide n’avait qu’à l’esprit l’apollon arrive il y a quelques minutes à peine, son âme se retrouvant toute chamboulée à sa simple présence dans le même espace que lui. sa commande passée et rapidement préparée par ses soins, le cadet s’était mis à faire preuve de curiosité, probablement déplacée. jiwon s’en veut, il n’aurait jamais dû l’interroger, finissant pas regretter ses mots prononcés trop vite. néanmoins, son interlocuteur lui, ne semblait guère offusqué, invitant même le gamin à s’installer. regard jeté vers ses supérieurs, « je sais pas si je peux m’installer… mes patrons vont encore me hurler dessus comme pas permis, désolé… » tournant de nouveau les talons, réplique de l’aîné sonnant comme un énième coup de poignard rouvrant une plaie qui n’avait jamais été totalement cicatrisée, souvenirs douloureux refaisant surface, comme si le temps ne s’était jamais écoulé depuis cet incident, là où sa vie à basculée. « je crois que je vais m’asseoir un peu en fin de compte… » il serait mensonges de dire qu’il n’avait pas été déboussolé par les mots du jeune homme résonant encore et encore dans ses pensées, torturant son esprit, ses iris fixant désormais ses chaussures usagées, honteux de montrer cette faiblesse qu’il n’arrivait à dissimuler, cette âme torturée qui n’arrivait pas à aller de l’avant, château de cartes totalement détruit qu’il n’arrivait plus à refaire désormais. « ben, on fait avec, pas le choix. » le regard toujours déviant, son léger sourire s’était désormais effacé, multiples flash de cette désastreuse soirée se répétant inlassablement dans ses pensées, impossible de s’en défaire. « c’est trop tard pour changer les choses de toute façon, le mal est fait et je pourrais plus danser alors affaire classée. » long soupir s’échappant d’entre ses pulpeuses, ses yeux embués s’étaient finalement dirigés vers l’aîné, haussement d’épaule accompagnant son regard. « sinon c’est jiwon au cas où vous auriez oublié. »

(tenue). Si Yeon n'avait pas vraiment cherché à éviter le regard du serveur qui ne lui semblait plus si inconnu que cela ; certainement parce qu'il n'avait pas été l'une de ses conquêtes mais l'un de ses clients pour le travail, sa mémoire ne lui avait pas joué de tour aux multiples périples. « Je saurai quoi dire à tes patrons s'ils ont un problème avec toi. J'ai une bonne créativité parfois. Assieds-toi, je t'en prie. » répondit-il accompagnant à nouveau ses paroles d'un hochement de tête en direction du vide. Il avait été formel, il ne laisserait pas le garçon filer d'un coup furtif - après tout, le serveur avait été le premier à le déranger pendant son travail. « Je m'en doute bien oui… Nous n'avions pas pris le temps de discuter après le procès, je me demandais si tu tenais le coup face aux résultats. » soupira-t-il presque sans quitter ses papiers des yeux alors qu'il ne les lisait plus. Si Yeon avait compris qu'il n'aura jamais dû reparler de cette histoire. La raison qui avait poussé le garçon à lui parler de ses questions étudiantes plutôt que de ce passage de sa vie qu'il aurait préféré ne pas vivre lui paraissait évidente à cet instant ; toujours l'art fantastique de frapper où tout faisait mal, douce habitude qui lui venait de son métier. Il n'était pas policier mais tout comme si c'était le cas et enfoncé là où il était, il n'arrivait plus à faire marche arrière. « Cinq pauvres années… Ce connard méritait dix fois plus que ça pour avoir brisé tes rêves. » lâcha-t-il finalement en souriant faussement, un regard noir posé dans le marron de ses yeux. Si Yeon c'était toujours promis de se donner à fond dans ses engagements et même si ce n'était pas dans ses habitudes, lorsqu'il s’agissait de son boulot les remords étaient toujours les bienvenues. Il s'en voulait. « Tu me l'as dit tout à l'heure. » fit-il en soupirant de l'intérieur ; un « merci » lui aurait arraché la gorge. « Alors c'est ce que tu fais maintenant ? » demanda-t-il alors que la question était plus qu'évidente. Il regardait la décoration de l'endroit, peut-être légèrement rassuré à l'idée qu'il n'avait pas abandonné, qu'il n'avait rien laissé tomber.

rêves brisés, espoirs disparaissant petit à petit et jiwon s’interroge, perdu dans ce monde trop inconnu pour lui, petit cocon dans lequel il était autrefois aujourd’hui brisé. alors, jiwon se contente de survivre, peinant à gagner sa vie, simple citoyen lambda dans sa propre misère et ses soucis personnels dont il ne parle à personne, se contentant de joindre les deux bouts seul, tel un grand garçon. mais, jiwon ressent cette lassitude, ce travail qui ne lui plaît guère et ce patron qui hurle au moindre écart alors le gamin est fatigué, las. seulement, l’arrivée de l’apollon est comme une bouffée d’air frais, un vent nouveau dont il avait grandement besoin, ne pouvant s’empêcher de refouler toute cette introversion. seulement, malgré cette énergie, les souvenirs de ce jour tragique sont évoqués, poing serrés et larmes ravalés, jiwon souffre mais n’a pas le droit de se laisser aller, pas maintenant. les dires du procureur n’arrivent même pas à le faire sourire, perdu dans ses pensées, ses souvenirs tailladant son cœur, rouvrant cette plaie qui n’avait jamais cicatrisé. jiwon veut quitter cette table, partir loin et fuir le plus vite possible et pourtant, il a aussi cette envie si puissante de rester et se noyer dans le regard du jang est bien plus forte, le scotchant à son siège, incapable d’exercer le moindre mouvement. « ben j’essaie d’arrondir mes fins de mois avec ce job à mi-temps et pour financer mes études en droit aussi, rien de bien palpitant. mais j’ai un patron tellement adorable que je ferais tout pour rester dans ce starbucks. » dernière phrase ponctuée d’ironie, long soupir quittant inconsciemment ses pulpeuses, jiwon réalise sa bêtise, plaçant ses mains devant sa cavité buccale, affreusement gêné. « je suis désolé on se connaît à peine et je me plaint de mon patron !! je vais retourner travailler je crois que ça sera mieux. contre son gré, le gamin se relève, luttant contre sa timidité et prenant une grande dose de courage, iris s’ancrant dans celles de l’aîné une toute dernière fois. mais sinon je finis mon service dans deux heures si vous voulez qu’on continue la discussion, je serais devant la boutique si jamais… » il espère, priant qu’il soit là une fois son service terminé tel le garçon naïf qu’il est.

(tenue). Il y avait de la nostalgie plus qu'à foison sur le visage du garçon et c'était peut-être pour cette raison que Si Yeon était encore là à lui parler, qu'il lui avait proposé de s'installer avec lui pendant qu'il consommait sa boisson encore fumante. Il avait quelque chose en plus, quelque chose qu'il n'expliquait pas. Jiwon n'était pas comme les autres et le procureur l'avait tout de suite vue ; la première fois que leurs yeux s'étaient retrouvés, et pourtant. Le plus vieux détestait peut-être un peu trop l'idée et se renfermait doucement, parce que ses clients étaient plus fragiles que les autres c'était toujours plus facile de craquer mais ça, il se l'était interdit ; une règle maudite sûrement comme toutes les règles qu'il s'imposait de lui-même. Ici, il se l'était promis. Ancien ou non, il ne jouerait pas comme avec les autres à la condition que l'envie de ne se présente pas à lui ; celle où le concerner restait sincère et sans mensonges, celle où lui, il ne finissait pas blessé. « C'est souvent comme ça avec les premiers petits boulots mais ne t'inquiète pas trop, ça s'arrange toujours. Tu ne vas pas faire ta vie avec ton patron, pas vrai ? Surtout si tu fais des études de droit, j'image bien que ta destination finale n'est pas celle du Starbucks d'à côté, n'est-ce pas ? » C'était sorti tout seul, comme un besoin de le réconforter dans son malaise puis, il avait sourit – peut-être sincèrement, d'un air chaleureux. « Je continue à travailler alors, peut-être que si je suis encore là dans deux heures, oui. » Parce qu'au fond, il en avait envie ; comme poussée par un destin qu'il ne connaissait pas, une envie soudaine de découvrir et de savoir pourquoi ils s'étaient recroisés, comme le coup d'un sort qu'ont leurs avait jeté. Ils étaient destinés.

le temps semble s’être soudainement arrêté, toute civilisation elle aussi sembla avoir disparue. ses iris ne regardent que lui, son regard rivé sur tout son être, il n’arrive pas à se le sortir de la tête, il a même l’impression d’être dans une bulle impénétrable. jiwon tente de rester le plus impassible possible et la mélancolie qu’il ressent parvient à le faire revenir à la réalité, tous ces rêves perdus qu’ils ne réalisera jamais lui permettent de s’accroche un tant soit peu pour ne pas se noyer dans le propre regard de son vis-à-vis. drôle d’ironie. alors, totalement hypnotisé par les mots de ce dernier, par cette voix suave qu’il possède, cette prestance qu’il dégage sans le moindre effort. alors, l’espace d’un instant, il se laisse aller, divaguant, se surprenant même à apprécier ce court instant. malheureusement, jiwon revient bien vite à la réalité, déçu de devoir s’esquiver, un léger sourire naissant sur ses pulpeuses, presqu’invisible sauf si l’on observe le garçon avec attention, réconforté parles dires du jeune homme. « oui, en effet… c’est pas un job que je souhaite garder toute ma vie vous avez raison, c’est juste une phase de ma vie, un petit coup dur à endurer qui me permettra de mieux rebondir, je l’espère. » jouant nerveusement avec ses doigts, gamin bien trop timide pour continuer à regarder le jeune homme droit dans les yeux, finalement intimidé par ce charisme, cette aura qu’il dégage. et pourtant, cette même présence l’apaise sans le moindre effort, comme si tout était irréel. « bon eh bien à tout à l’heure peut-être alors. » il finit par retourner à ses occupations, priant silencieusement que l’aîné allait bel et bien être encore présent deux heures plus tard, si seulement. son esprit n’est rivé que sur lui, il a beau tenter de se concentrer, rien n’y fait. et, pourtant, l’arrivée soudaine d’une multitudes de clients vint chasser le garçon de ses pensées tourmentées, comme si le destin cherchait à lui faire passer ces deux longues heures dans l’espoir de le retrouver une fois ces lieux vidés et les portes closes.

(tenue). Cette énième rencontre avec le garçon avait fini par tomber à pique, le lieu et la raison différente quand bien même. Plongé dans une discussion qui ne concernait pas son travail à proprement parler lui faisait un peu de bien, une pause qu'il n'avait pas eu conscience d'utilité jusqu'ici. « Il n'y a pas de raison. » S'il le voulait, il pouvait y arriver. Si Yeon n'avait jamais eu le quelconque besoin financier de travailler comme le garçon et pourtant un doux air de compassion flottait entre eux. Avec leurs yeux sans doute, la conversation s'approfondissait davantage encore qu'avec les mots, le sentiment palpable d'incompréhension qui hantait le plus vieux tandis qu'il se raclait doucement la gorge, gêné. Rares étaient les conversations qu'il menait sans idée derrière la tête où la seule exception prônait sous le nom d'Hea, sous le nom de ses clients dans le cadre de son bureau. Le procès de Jiwon fini, la rencontre hasardeuse entre eux et le sentiment étrange pourtant ; il ne comprenait pas, agissait contre ses propres règles, ses propres lois. Et mettant ses actions sous le compte de son travail, il recommença à lire ses papiers avec sérieux.

« Shin Jiwon. » Sa voix grave résonnait déjà dehors, la nuit tombée et le sac d'affaire en main. Un rictus qui se voulait transparent était alors apparu face à la surprise du regard du serveur ; l'espoir de le voir à nouveau qui l'avait certainement quitté lorsqu'il avait préparé ses affaires et qu'il était simplement sorti sans un mot. Si Yeon avait alors hésité longuement entre rejoindre le bureau et continuer son travail ou tout plaquer pour une destinée, une envie soudaine qu'il n'était pas sûr de comprendre. Est-ce que Jiwon avait des pouvoirs ? L'avait-il ensorcelé ? Incertain de lui-même, de ses propres choix, de ses propres mots, il avait pourtant ressenti le besoin de se lancer dans un monde où les jugements n'existaient pas. Jiwon l'avait rencontré sous son vrai jour – à quelques exceptions près – et c'était peut-être la raison qui rendait les choses si simple, si réalisable.

il n’arrive à observer le jeune homme droit dans les yeux, charisme bien trop fort impressionnant le gaillard qui peine à rester de marbre face à la carrure du procureur et pourtant, plus les secondes s’écoulent et plus le pauvre serveur parvient à s’ouvrir au garçon, comme si tout devenait naturel, comme s’il ressentait ce besoin de tout lui confier. alors, forcément, ça effraie jiwon, son esprit ne cessant de plonger son âme encore un peu plus dans les tourments et pourtant cette irrésistible envie de foncer vers l’inconnu, de se laisser aller rien qu’une fois, comme avant. alors il continue de bavasser avec l’apollon, se surprend à esquisser un faible sourire de temps à autres puis, finalement, rattrapé bien trop rapidement par la réalité, il se lève, bien obligé de devoir mener à bien son travail et conserver son job si précieux aujourd’hui et qu’il souhaite pourtant par-dessus tout quitter. et, malgré tout, jiwon ne cesse d’observer si yeon, espérant dur comme fer qu’il restera à l’attendre, n’arrêtant de l’observer discrètement entre deux cafés envoyés, déception gagnant son être lorsqu’il le vit préparer ses affaires et quitter la boutique sans un mot, ni même un regard.

le reste de la soirée avait été bien monotone, le gamin perdant le peu d’entrain qu’il a pu gagner lors de ces quelques minutes en compagnie du jeune homme. et pourtant, une fois les lumières éteintes et les lieux fermés, une voix familière se fit entendre, large sourire s’étendant presqu’instantanément sur les pulpeuses du garçon, se hâtant d’accourir à ses côtés. « ah finalement vous êtes restés ! je suis troooop content. mains déposées sur ses lèvres, sa gaieté de le revoir prenant le dessus sur ses dires, ses joues prirent une couleur rosie, son être rapidement gagné par la gêne. enfin je voulais dire que ça fait plaisir… bon, on va ou ?? » jiwon perd ses moyens, gamin habité désormais par la honte, s’étant probablement ridiculisé devant la seule personne dont il voulait donner la meilleure impression, se cachant alors bien rapidement le visage dans le creux de ses mains. la soirée commence merveilleusement bien.

(tenue). Il n'était pas complètement conscient de ce qu'il était actuellement en train de faire. Pourtant, il le faisait sans se sentir obligé. Et c'était quelque chose qu'il n'avait plus fait depuis longtemps… De faire les choses sans y être forcé. Hea, elle était cette exception, celle pour qui il pourrait déplacer des montagnes rien que pour la voir sourire. Avec Jiwon, c'était un sentiment différent qui l'enveloppait. Peut-être parce qu'il le voyait comme un procureur, rien de plus. Il n'avait pas été une de ses victimes, n'était pas concerné par un mensonge qu'il avait dit ou fait. Au contraire, il était simplement celui qu'il avait voulu protéger lors d'un procès et qu'il recroisait aujourd'hui encore par le plus grand des hasards. Si Yeon n'avait pas l'habitude de recroiser de vieux clients – ou même les récents. Alors peut-être que ce choix si soudain de vouloir tant passer la soirée à ses côtés avait un rapport avec ce quotidien marqué au fer rouge. Il n'avait pas envie de faire de bêtise ce soir, pas envie de rentrer chez lui et inquiéter sa femme parce qu'il avait été frappé deux ou trois fois dans les côtes avant qu'on le laisse tranquille. Il avait envie oui, de se perdre dans les yeux du garçon, de sourire face à cette douceur qui l'animait.

Ses iris s'étaient alors immédiatement perdu dans ceux du garçon quand un sourire était doucement apparu sur son visage en l'entendant. Là encore, il espérait désespéramment que la sincérité prônait dans ses actes. Si Yeon ne faisait confiance à personne d'autre qu'à lui-même avant tout, avait peur d'être une fois de plus déçu après s'être attaché. Et il n'était pourtant pas le mieux placé pour espérer une telle chose ; cruelle utopie. « Juste profiter un peu en marchant ? » C'était vrai ça. Il avait attendu sagement, contacté Hea pour la prévenir mais n'avait pas songé à ce qu'ils auraient pu faire une fois s'être retrouvé. Il se sentait presque un peu trop bête de proposer une simple promenade comme s'ils étaient deux amants, les doigts mêlés en moins. Alors il soupira doucement en gardant son calme. « En fait, je n'ai pas vraiment d'idées alors peut-être qu'en marchant on pourra trouver et hum… Discuter aussi. » Faire connaissance. Si Yeon connaissait déjà tant de choses sur Jiwon mais la réciproque n'y était pas. Et il n'était pas le roi pour parler de lui. C'était peut-être ce qu'il y avait de pire dans sa vie… Raconter sa vie sans en inventer une autre.

c’est la première fois que son esprit connaît un tel engouement, un semblant d’espoir qui l’aiderait à sortir de toute cette mélancolie dans laquelle il s’est enlisé petit à petit, gamin plongé dans l’obscurité persuadé de ne pouvoir connaître de nouveau l’allégresse qu’il possédait autrefois. seulement, il n’a fallu que quelques minutes passées aux côtés d’une personne qu’il ne connaît que très peu pour qu’il vit une infime lueur d’espoir, un semblant de ce quelque chose indescriptible mais qui saurait le sauver. alors, pour une fois depuis bien longtemps, jiwon se laisse aller, se surprend à esquisser d’imperceptibles sourires, se hâtant même de terminer son service non pas pour retourner chez lui mais plutôt achever cette soirée aux côtés du charmant, espérant qu’il répondrait à sa proposition. le cadet, finalement son service achevé, quittant les lieux avec empressement, se surprend à sourire de nouveau lorsque son regard se pose sur le jeune homme face à lui, soulagement gagnant son être en réalisant qu’il ne s’était pas éclipsé malgré son invitation, si bien qu’il en perd l’usage de ses mots une fois face à lui, gamin bafouillant face à la seule personne dont il espérait ne pas perdre ses moyens.

« euh oui c’est une bonne idée ! on a qu’à aller n’importe où, ça me va.. »  paroles prononcées en toute sincérité, tous deux s’en allèrent de ces lieux, l’un à côté de l’autre, l’air frais de la capitale enveloppant le corps du jeune homme, réprimant un frisson. « sinon… vous avez quel âge ? votre travail m’intéresse grandement hein mais j’aimerais bien en savoir un peu plus sur vous si ce n’est pas trop indiscret… » mains dans les poches, regard fixé vers l’horizon, jiwon a envie de le connaître davantage, d’en savoir plus sur cette personne qui parvient tant à l’hypnotiser sans avoir à le charmer avec des quelconques mots enjôleurs. « oh, il pleut je crois, j’ai reçu des gouttes sur ma main » la soirée débutait sur les chapeaux de roues.

(tenue). Apparence détendue quand l'esprit ne l'était pas. Proche du tracas interne qu'il ne montrait d'aucune façon extérieurement. Fidèle à lui-même ; sentiments qu'il refoulait, qu'il tuait d'un simple claquement de doigt. Néanmoins était-ce si facile de réprimer une chose qui semblait inévitable ? Cœur au bord de l'explosion. Confronté à lui-même dans une situation considérée comme bien trop rare. Quotidien brisé en deux par l'étudiant, ancien client qu'il avait protégé en bonne volonté. Gamin qui n'avait alors rencontré aucun de ses mensonges ; embarras présent d'en dicter un par réflexe. Peur continue de gâcher une histoire qui ne faisait que commencer … Une histoire qui l'angoissait. Une histoire dont il voulait voir le bout du tunnel pour y débuter la route. Mais il se laissait prendre dans les filets d'inconscience de ce dernier, le laissait ouvrir les voies d'un chemin tempétueux.

« Tu me donnes combien ? Je te donne un indice, je suis un peu plus vieux que toi. » Esprit joueur qui ne le quittait jamais. Caractère qui s'était forgé en lui depuis bien des années ; soupçons de mensonges dissimulés derrière le masque de la vérité. Carte à double tranchant qu'il mettait de côté. Envie de sincérité dans le tapis de mensonges qu'il avait semé autour de lui. Crainte définitive de croiser sur le chemin un esprit vengeur. Alors il ferme les yeux, se contente de marcher silencieusement. Si Yeon avait simplement hoché la tête au constat du garçon. « Oui. » Voix légèrement froide, involontaire de sa part quand il posa sa main sur celle de Jiwon pour y mêler ses doigts. Action qu'il avait apprise à faire au fil du temps ; inconnu d'une nuit, réveil du lendemain. Son organe qui semblait pourtant vouloir éclater en lui. Cœur chaud d'un mouvement qui semblait différent. « On va se mettre à l'abri le temps que ça passe. » fit-il en tentant d’esquisser un simple sourire qu'il ternit l'instant d'après. « Je suis désolé de ne pas avoir été prévoyant, je ne pensais pas que ça tomberait aujourd'hui. Bouge pas, je reviens. » Éclipse de quelques minutes alors qu'il courait dans l'eau maintenant pluie de cornes.

tout ça semble iréel, jiwon est confus, incapable de savoir si ce qu’il resent est bel et bien de la joie. sentiment enfoui depuis des années, incapable de ne ressentir rien d’autre que de la mélancolie et du chagrin, le malheureux est en cet instant perturbé, troublé de savoir que ce jeune homme qu’il ne connaît que très peu est probablement à cause de toute cette euphorie qu’il contient lorsque son regard croise le sien à la fin de son service. cette soudaine allégresse finit pourtant par le chambouler, incapable de savoir la raison de toute cette énergie, de toute cette tristesse qu’il oublie lorsqu’il finit par entendre la voix du gaillard, finissant par céder à cet instant loin de tout, loin de son passé. « euhh un peu plus vieux…? j’aurais pensé vingt-huit ou quelque chose comme ça toutes mes excuses !! du coup… vingt-trois ou vingt-quatre ans ? » à peines ses mots prononcés que le ciel vint jouer en leur défaveur, une pluie commençant à faire surface et, bien rapidement, les doigts de l’aînés vinrent s’entremêler à ceux du gamin. les yeux grossis par la surprise et ses joues prenant une teinte rosies, jiwon perd ses moyens, totalement déstabilisé par siyeon. d'habitude réticent à ce genre d’actions, un simple sourire naquit sur ses pulpeuses, resserrant alors inconsciemment ses doigts autour de ceux du jeune homme.

« mais… faut pas s’excuser c’est pas de votre faute s’il se met à pleuvoir !! attendez, partir sous cette pluie ?? vous allez être trempé, c’est préférable qu’on attende à l’abris !! » des mots prononcés en vain puisque l’aîné s’est déjà éclipsé, s’aventurant sous cette pluie torrentielle, véritable déluge tandis que jiwon patiente, attendant le retour du garçon, anxiété naissante. « mais il va être malade comme un chien où est-ce qu’il est parti ?! » commençant à ôter sa veste pour l’enfiler par-dessus sa tête, jiwon s’apprête à à partir à sa recherche, inquiet de savoir siyeon sous ce déluge.