spring

j'ai pas passé une matinée à chercher un jean pour rien

elle sourit. pas beaucoup mais assez pour que n’importe qui le remarque. un sourire léger voguant sur ses lèvres claires. depuis combien de temps ce n’est pas arrivé ? un peu de légèreté dans la vie de la gamine esseulée. longtemps. trop pour qu’il soit raisonnable de la compter. comme si son entrée à l’université avait tout changé. ce père qui lui manque tant était venu assister à sa remise des diplômes et l’avait félicitée. sa mère avait cessée d’essayer de la contacter. et plus important encore : ils s’aiment. drôle de sentiment qui vient broyer son cœur pour en faire quelque chose de nouveau. brisée pour mieux recommencer. essayant tant bien que mal de construire quelque chose à partir des cendres qu’elle avait laissée. une addiction aux chewing-gums et les mains parfois prisent de spasmes pour remplacer la drogue.
elle ne remarque même pas les regards qui se posent sur elle alors qu’elle demande son chemin. pas plus qu’elle ne fait attention à ceux des garçons de son propre département. pas plus qu’elle ne les voit eux. elle marche sur le campus à la recherche du département des sciences. continue ses recherches. posent des questions. il est si rare de la voir s’adresser à autant d’inconnus en plein jour. sans alcool ou autre substance dans le sang. tandis que ses dents mordillent avidement un chewing-gum à la fraise. on la guide jusqu’à un couloir. on lui montre une porte. on lui dit qu’il donne un court dans cette salle. elle attend. adossée au mur, bien en face de la porte. pour être sûre qu’il ne la loupe pas. pour qu’elle soit la première chose qu’il voit en sortant de la pièce. elle mâche. le regard fixe et un petit sourire en coin qui ne la quitte pas.