back to neverland - chulhei

New York. Sentiment étrange d’être dépaysé sans l’être. La ville qui ne dort jamais lui rappelle à certains moments Seoul. Parfois même Tokyo les fois où il a posé les pieds à la capitale Nippone. New York qu’il arpente déjà depuis une semaine, profitant des heures de pause pour partir à la découverte de la ville symbolique américaine en compagnie de Chulhei. Laissant Jude derrière eux qui râle par principe. C’est presque des vacances quand on y pense. C’est presque vital aussi. Cet éloignement. Il en avait besoin. En a besoin. Parce qu’il suffoque. Seoul le fait suffoquer. Plus qu’il ne le montre. Alors il s’est perdu. Trop investi, c’est à peine si aujourd’hui il n’a pas eu une moue boudeuse lorsqu’on lui a annoncé que c’était un jour de repos. Mais il ne dit rien. Garde tout derrière un sourire. Et le voilà en expédition. Il a épargné à Chulhei son footing matinal, mais l’a réveillé à son retour. Presque mis sous la douche de force juste pour pouvoir disparaître dans les rues bondées de la ville. De Times Square à Broadway en passant par Central, ils n’ont pas arrêté. Et la nuit est tombée sur eux, achevant cette première semaine dans cet ailleurs captivant. La nuit est tombé et ils la contemplent en haut d’une tour, restaurant luxueux dont la terrasse donne une vue à couper le souffle. « Hey Chul'. Ça va toi en ce moment ? Les gens, les amours, tout ça. Je te demande pas le boulot, vu que tu bosses avec moi, ça ne peut qu'aller. » D’un accord tacite, ils n’en parlent pas ou peu. De ce moment au studio de photographie. Celui où il a pris le temps de l’aimer, de le révérer. De dessiner les courbes de son corps, de lui dire les mots que d’autres ne lui donnaient pas. À quel point il était sublime. Magnifique. À quel point il importait. Précieux. Il avait pris le temps de le rassurer, de remonter son ego, son être que d’autres piétinaient. Ils ne parlent pas de tout ça. Rigole juste au souvenir de la styliste de Shina qui les a grondé en sortant de la loge. Photos prises ce jour là encadrées et chéries, il se doute que Chulhei a fait pareil. L’espère au moins. « Haewan a coupé les ponts avec moi. À la Saint Valentin. C'est risible un peu ... Parce qu’il n’a pas voulu concevoir mon aromantisme … Et qu’il ne veut pas de moi en simple ami. » Il ne sait pas ce qu’il raconte Shina. Ne sait pas pourquoi il se dévoile, lui qui garde toujours tout derrière un sourire. Mais il sait que Chulhei l’écoutera toujours, même quand l’alcool embrouille un peu les sens. Il sait qu’il ne le jugera pas. Qu’il ne condamnera cette absence de sentiment qu’on lui reproche. Pas d’amour, mais jamais sans émotion. « Hm … J’espère que tu as trouvé quelqu’un Chul. Qui t’aime mieux que l’autre. Qui te fera pas du mal. Tu mérites tellement ça. »

Il est heureux d’avoir pris le large, ne serait-ce que pour l’opportunité que shina lui a offert en l’emmenant ici et les rencontres qu’il y a fait depuis. professionnellement, il est proche de l’euphorie et les compliments l’ont encouragé – c’est indéniable, chulhei adore son métier. une semaine est passée et plus personnellement, il n’est pas loin de craquer. il y a des choses qui l’effraient à être si loin de chez lui, du familier et son téléphone ne s’est pas souvent animé, mais il s’en doutait. le décalage horaire, le boulot et la fatigue du soir auront eu raison de lui. cet ami dont la seule pensée emballe son cœur lui manque, d’autant plus lorsqu’il observe la vue de si haut, en un lieu trop huppé pour lui. c’est tellement apaisant vu du ciel que sur l’instant, il oublie tous ses soucis. ce n’est que par la voix du japonais qu’il sort de ses rêveries, le regard tourné une fois vers lui avant de retourner sur la ville éclairée. il hausse les épaules sans répondre, un sourire mince et inconscient sur les lèvres tandis qu’il cherche une réponse à cette question. est-ce que ça va ? pas moins bien qu’avant, pas mieux pour autant. Il ne sait jamais y répondre, ment la plupart du temps pour ne pas voir l’inquiétude sur les visages, mais avec shina c’est différent. depuis le jour où il lui a donné l’affection dont il manquait, tout a changé. ce n’est pas qu’il ne peut plus lui mentir, mais qu’il ne veut plus. il est cet ami avec qui il se sent à l’aise de parler, avec qui la peur d’être jugé disparaît et celle du rejet, n’a même pas lieu d’être. shina reste et c’est important pour lui, d’avoir sa confiance au boulot comme en dehors. alors, lorsqu’il lui confie ses propres peines avec un dénommé haewan, chulhei tend l’oreille avec la plus grande attention. « oh.. il était au courant ? c’est dommage … de ne pas essayer de comprendre. tu lui en veux ? » comme shina le fait pour lui, il veut essayer de lui lever ce voile de tristesse pour lui ramener un vrai sourire, mais les mots qu’on lui adresse ensuite le brisent. Ils riaient si forts il y a quelques heures, mais la nuit est tombée et sous les étoiles qui veillent, les émotions qui reviennent. « ah … vous me le dites tous, que je mérite ceci et cela … être heureux, aimé … » il respire à fond pour ne pas se laisser dépasser et d’un regard vers shina, il continue. « mais je suis retombé amoureux et ça me rend triste. ironique, uh ? » il penche la tête pour la poser contre sa paume et sourit envers shina, pressé de revenir sur ses confidences. « tu l’aimes bien, ce haewan ? il avait l’air mignon, du peu que j’me souviens. raconte-moi. » en attendant, il finit la bouteille de vin blanc en leur servant un dernier verre chacun. l’alcool délit les langues et sur chulhei, il peut avoir tous les effets selon ses humeurs.

New York et sa folie. Pas une seconde à perdre. Et ils courent à gauche, à droite. Et Shina ne pense plus à rien. Fait comme si de rien n’était. Ça le change du mois précédent à ressasser sa peine, le sentiment d’abandon qui ronge son cœur. Encore un peu maintenant. Mais il ne veut pas y penser, se soumet au rythme de Jude, rythme infernal, et entraine Chulhei dans cette course folle. Sauf que la nuit, le sourire se fait moins éclatant, et la mélancolie reprend son règne. Sur le toit du monde, la terrasse du restaurant donnant une vue imparable de la ville. Il n’a pas regardé les prix du menu, demandant juste de la tranquillité, la couleur de sa carte bancaire assurant que ses demandes soient prises en compte. Ils sont tranquilles au final, à l’abri des oreilles indiscrètes, seules les étoiles pour les écouter. Et dans ce silence, Shina ne peut que parler. Besoin évident de se confier à quelqu’un sans savoir comment le faire. Besoin évident de dire à quel point ça lui a fait du mal. Mais au final comme toujours, c’est le masque qui l’emporte, la nonchalance dans sa voix et un air détaché. Sans doute qu’il est égoïste à ne pas vouloir avoir plus d’informations sur Chulhei avant de déballer ses problèmes. Mais dans le fond il se doute. Lorsqu’il voudra en parler, son maquilleur et coiffeur d’ami le fera. Voilà tout, ça ne sert à rien de forcer les gens s’ils ne sont pas prêts. « Je ne lui en veux pas … Ça serait si simple de dire ça … Je suis déçu … Je ne pensais pas … Est-ce que je suis vraiment si égoïste ? » Il n’arrive pas à mettre des mots sur ses émotions. C’est comme un trop plein. De la tristesse bien sûr, les larmes qui ont coulé ce soir là. De la colère, l’impression qu’au final peut-être Haewan ne l’a jamais véritablement vu.  Ce sentiment d’abandon qui prend au cœur encore et encore. L’espoir qu’il revienne vers lui, mais en même temps rien à lui offrir véritablement. Le visage en arrière, le bras sur ses yeux, la crainte d’y laisser de nouvelles larmes, il ne peut que soupirer. Soupirer avant de finir son verre annonçant à Chulhei qu’il devait être heureux. Parce qu’au final, Shina est quelqu’un de simple. Ne désire que le bonheur de ses êtres chers. « Moi et l’amour tu sais. » La réponse est un peu triste. Aussi bien pour la situation de Chulhei que pour la sienne. Pas du genre à encourager le sentiment romantique, il en connaît ses déboires. « Tu l’as vu plusieurs fois oui … Il y avait une bonne alchimie. Et ça me suffisait … Mais … Il est tombé amoureux. Et il a voulu plus. N’a pas voulu comprendre … » Qu’il n’avait rien à donner en plus. Rien si ce n’est des étreintes vides et le silence à ses déclarations. « Je dois sans doute être ignoble … Mais je n’ai rien à lui donner. Si ce n’est ce qu’on avait déjà. Alors il a décidé de ne plus jamais me voir … » Les derniers mots un peu plus délicats à passer entre ses lèvres, et le vin pour les faire passer tout court. Ses lippes contre le lèvre, il hume légèrement, son regard restant sur Chulhei. « Amoureux ? Vraiment amoureux ? »

Shina égoïste ? ce sont les deux mots les plus incompatibles qu’il ait pu entendre. Il secoue la tête en réaction aux questions de son ami et enchaîne du mieux qu’il peut. « pas égoïste non, tu as une perception différente, c’est tout. lui est égoïste. » il voit shina se couvrir les yeux et c’est une négativité certaine ressentie envers ce haewan de rendre son ami d’ordinaire plus positif, si triste. les histoires d’amour ne sont pas leur point fort et sous la remarque du japonais, chul hei s’autorise à rire parce qu’il n’en pense pas moins. l’amour non réciproque est douloureux et d’un côté, il peut comprendre cette autre personne pour se sentir dans la même position, mais il ne comprend pas l’aromantisme et ne peut pas en blâmer son ami. ignoble ? non et une fois de plus, il secoue la tête. Tout cela est bien triste et sous ce voile étoilé, verres d’alcool à la main, la nostalgie ne pouvait pas être plus au sommet. « tu lui donnais de l’affection et c’est… bien, tu étais fidèle ? oh- t’étais célibataire quand on a-? » il se couvre les lèvres et son visage chauffe violemment au souvenir, pensée soudaine qui allège son cœur et qui une fois encore, le fait doucement rire. C’est la première fois qu’il évoque ce dérapage depuis le jour où c’est arrivé, et c’est embarrassant d’y entendre les échos de sa propre voix dans son esprit libéré. Dernier verre de vin avalé d’une traite et il se sent tanguer. Il a la tête légère, voudrait tourner sur lui-même en cherchant la lune dans le ciel et… « Je suis désolé shina, c’est regrettable de perdre quelqu’un que l’on aime et ne rien pouvoir y faire. Aucun de vous n’a tort ou raison, vous n’êtes juste… peut-être pas compatibles. » il peut comprendre la douleur que doit ressentir haewan à l’idée de ne pas voir ses sentiments retournés, mais il se met aussi à la place de shina. ce qui ne se définit pas dans la norme est souvent rejetée, différences mal acceptées par la société. le sujet rebondit sur lui et ça le surprend un peu, ça le sort du brouillard que deviennent ses pensées et il hoche la tête sans même essayer de brouiller les pistes. Son cœur à découvert quand le contrôle de ses pensées disparaît. « je l’aime et j’avais peur de ça, avant. Je l’ai blessé il y a longtemps et il ne m’aime plus comme ça, maintenant. On est… ami et c’est difficile pour moi, mais je souffrirais bien plus de le perdre, tu vois ? » un esprit réaliste lui dirait de lâcher prise, mais il n’en écouterait aucun. il est conscient de ce qu’il s’inflige et pour le moment, il fait avec. « j’ai peur de recommencer à zéro. rencontrer quelqu’un et apprendre à faire confiance… j’ai essayé et je fuis dès le premier rendez-vous. » traumatisme qui l’empêche d’avancer et ses sentiments pour un autre, de toutes façons, l’empêcheront d’aimer à nouveau. « satisfait par le voyage, sinon ? merci de m’avoir emmené.. et pour avoir trouvé cet endroit. » il voudrait explorer un peu et décide de se déplacer, mais son équilibre n’est plus vraiment là et ce sont de nouveaux rires qui passent ses lèvres, un mélange de plénitude et de nostalgie.